Bilinsky commence à étudier la décoration en Allemagne, en 1921, sous l'égide de Max Reinhardt. En 1923, il rejoint Paris et s'intègre tout naturellement à la communauté des émigrés russes, parmi lesquels Léon Bakst, avec qui il étudie la peinture. Il travaille également pour le théâtre (La chauve-souris de Nikita Balieff, L'arc en ciel) et se lie d'amitié avec Georges Annenkov et Simon Lissim. Après avoir rencontré Ivan Mosjoukine, il entame une carrière riche et variée (décorateur, costumier, affichiste) pour le cinéma dans l'équipe de Russes des studios Albatros, à Montreuil.
Trop tôt disparu pour rester célèbre aujourd'hui, Bilinsky fut un artiste reconnu de son vivant comme un maître.
Il imagine entre 1924 et 1927 des affiches de cinéma parmi les toutes premières vraiment modernes : Le lion des Mogols (Epstein, 1924), La rue sans joie (Pabst, 1923), Metropolis (Lang, 1926). L'usage est alors de commander des affiches pour le même film simultanément à plusieurs dessinateurs, mais c'est souvent Bilinsky qui illustre en plus le manuel de publicité : La rue sans joie, Les aventures de Robert Macaire (Epstein, 1925), Gribiche (Feyder, 1925), etc. Il est reconnu par la presse des années 30 comme "l'un des meilleurs" et "le plus célèbre des affichistes de cinéma". Bilinsky explique que les affiches doivent servir à attirer et frapper loeil du passant, non à lui raconter le film. Il faut donc respecter des principes : la tache de couleur qui, visible de loin par sa taille et son contraste avec une tache de couleur voisine, doit composer un dessin schématique ; ne pas noyer le dessin par le texte ; l'affiche de cinéma doit être dynamique, ce qui la différencie de l'affiche publicitaire ordinaire ; le titre doit être "incorporé à la substance même de l'affiche, faire partie de sa composition et non lui être superposé, ainsi que cela arrive trop souvent". Ses costumes pleins de fantaisie produits pour Le lion des Mogols (1924) lui valent le succès. En 1925, il réalise costumes et décors pour le film d'anticipation 1975 (Mosjoukine). La célébrité vient avec les costumes de Casanova (Volkoff, 1926). Qu'ils soient fantaisistes, historiques comme dans Casanova ou contemporains comme dans Paname n'est pas Paris (Malikoff, 1927), les costumes de Bilinsky ont pour leitmotiv la recherche de l'idée, de la suggestion, afin que la personnalité de l'acteur soit perceptible dans le temps parfois très bref laissé au spectateur pour voir le costume. Léon Barsacq explique dans son livre Le décor de film les apports de Bilinsky décorateur : "Bilinsky (...) a introduit en France les nouvelles techniques du décor construit, du staff, des maquettes en volume (...), un certain faste décoratif, inconnu jusque-là dans les studios français mais pratiqué à la UFA de Berlin". Dans le décor du palais de Monte-Cristo (1928) d'Henri Fescourt, Boris Bilinsky, qui dessine également les costumes, nous restitue une image du "palais" tel qu'auraient pu le concevoir Bibiena ou Piranese, décorateurs d'opéras italiens du XVIIIe siècle : escalier monumental, colonnades, arcades et balcons... ; mais c'est un décor construit, tout au moins jusqu'à une certaine hauteur, le haut est réalisé en maquette réduite et le fond est peint en trompe-l'oeil." La guerre éclate alors qu'il attend à Rome la naissance de sa fille avec son épouse italienne. Il reste donc en Italie et recommence à travailler, principalement pour la maison de production Titanus.
A Berlin, Bilinsky travaille comme décorateur pour des théâtres russes (L'Oiseau bleu) et expose des aquarelles abstraites dès 1921. Sa passion de la musique le mène dès 1930 à des recherches de retranscription de morceaux classiques sous forme de dessins animés en couleurs. Il a aussi un projet personnel d'illustration de L'apocalypse. Il travaille pour l'Opéra Russe à Paris avec Nicolas Evreinov et Bronislava Nijinska (Rouslan et Ludmila, L'amour sorcier) et pour les Ballets Russes de Monte-Carlo. En 1937, ses décors pour Pelléas et Mélisande - choisis pour la représentation donnée à Covent Garden pour le couronnement de George VI - lui valent une Médaille d'or à l'Exposition Internationale de Paris. En Italie, il collabore à des productions théâtrales comme Sainte Jeanne de Shaw (Teatro Argentina, 1943) et travaille pour le chorégraphe Aurel Milloss : Casse-Noisette (1945), Follie Viennesi (Scala de Milan, 1947).