Roger Corbeau est très tôt intéressé par les films expressionnistes allemands. Son père, bibliophile éclairé et grand amateur de musique classique, lui offre dès l'âge de 12 ans son premier appareil, un Golding Kodak 6x9. Il termine ses études secondaires à Nancy puis se rend à Amsterdam où il travaille dans une maison d'importation de thés.
Roger Corbeau l'un des photographes de plateau les plus connus du cinéma français entre les années 1930 et les années 1980, spécialisé dans les portraits, dont quelques-uns sont restés dans la mémoire collective.
En 1932, il débute sa carrière au cinéma sur le tournage de Violettes impériales, avant de devenir accessoiriste sur quelques films. C'est en 1933 que Marcel Pagnol remarque ses photos d'amateur prises sur le tournage du film Le Gendre de Monsieur Poirier où il officie en tant qu'accessoiriste. Dès lors, il devient son photographe de prédilection. Leur collaboration durera six ans : Jofroi, Angèle, La Femme du boulanger...
Simultanément, il travaille avec d'autres grands noms : Abel Gance (Le Journal d'un jeune homme pauvre en 1935 et Jérôme Perreau en 1935), Marcel L'Herbier (La Citadelle du silence en 1937).
Il rencontre Jean Cocteau en 1945 pour lequel il photographie Les Parents terribles (1948) et Orphée (1949), puis Robert Bresson (Journal d'un curé de campagne en 1950) et Orson Welles (Mr. Arkadin en 1954, Le Procès 1962).
Technicien appliqué et méticuleux, il impose rapidement son style photographique très composé qui reste son image de marque. Après le tournage, il met les acteurs en scène selon sa propre vision du film en s'efforçant de produire une seule image synthétisant une scène.
Ses portraits sont des investigations personnelles exercées dans l'univers fantastique du cinéma. Un univers fait pour lui d'ombres et de ténèbres et dans lequel n'apparaissent que les figures mythiques. " Quand ces acteurs arrivent sur le plateau, il faut tout oublier, on ne sait plus rien de leur vie privée, et c'est là qu'opère la magie ". Jean Marais (Les parents terribles, Orphée), Dany Robin (La fête à Henriette, Frou-frou), Anthony Perkins (Le couteau dans la plaie, Le glaive et la balance) ou Mélina Mercouri (Phedra, La promesse de l'aube) le réclament même par contrat tandis que des cinéastes comme Julien Duvivier (Voici le temps des assassins, Marie-Octobre) , Jules Dassin (La loi, Topkapi), Orson Welles (Monsieur Arkadin, Le procès) et Claude Chabrol (La décade prodigieuse, Violette Nozière) lui vouent une fidélité à toute épreuve.
Interviewé en 1983 sur son évolution en tant que photographe, Roger Corbeau déclare : " Mon style est là depuis le début, bien sûr au fil des années j'ai appris. Mais quand je regarde les premiers portraits que j'ai faits, je les trouve conformes à ceux que j'ai faits vingt ans plus tard. Je crois que j'ai eu la très grande chance de ne jamais perdre ma spontanéité. C'est la passion, encore et toujours la passion qui ressort. "
Grand prix européen de la photographie de plateau en 1982, Roger Corbeau a beaucoup exposé en France et aux États-Unis.
En 1985, il est fait Chevalier de la Légion d'honneur au titre des arts et des lettres.
En 1994, il fait don de l'ensemble de son oeuvre photographique à l'Etat français.