Ciné-Ressources – Fiches personnalités

Marie Epstein

Scénariste, Réalisateur, Assistant réalisateur, Interprète, Dialoguiste


imprimer
Naissance
14 août 1899 à Varsovie (Pologne)
Etat civil
Marie-Antonine Epstein
Décès
24 avril 1995 à Paris (France)
>> Rechercher "Marie Epstein" dans le catalogue Ciné-Ressources

Formation

Née au seuil du XXe siècle d'une mère polonaise et d'un père français, deux ans après son frère Jean auquel son destin sera intimement lié, Marie Epstein passe son enfance en Suisse, à Lausanne. Elle suit des études secondaires dans une institution religieuse catholique à Fribourg. En 1914, la famille s'installe à Lyon. Avec son frère, qui poursuit des études de médecine, Marie se passionne pour cet art tout jeune qu'est le cinéma, voyant jusqu'à trois films par jour. Tous deux arrivent à Paris en 1921 où leur amour pour le cinéma va prendre une forme active.

Carrière au cinéma

Marie Epstein fut l'une des rares femmes scénaristes et réalisatrices du cinéma français des années 1920-1930, avant de prendre une part essentielle dans l'inventaire et la restauration des archives filmiques de la Cinémathèque française.
À Paris, les Epstein rencontrent le réalisateur Jean Benoit-Lévy, auteur de documentaires scientifiques et préoccupé d'éducation populaire. Grâce à lui, Jean réalise en 1922 son premier film, Pasteur, pour commémorer le centenaire de la naissance du savant. Marie y fait une apparition. La même année, elle écrit son premier scénario, Les Mains qui meurent. Elle commence une double carrière d'actrice et de scénariste avec les premiers films de son frère, avec qui elle écrit en 1923 Coeur fidèle, dans lequel elle interprète une petite bossue. Elle signe ensuite le scénario de trois autres films de Jean : Six et demi, onze (1926), ainsi que deux autres produits par Les Films Albatros, une société de production d'origine russe, Le Double amour (1925) et L'Affiche (1924), l'histoire du combat d'une mère brisée par la mort de sa fille dont elle a vendu l'image pour une affiche publicitaire. Au milieu des années 1920, la carrière de Jean Epstein s'envole. Avec d'autres cinéastes de "l'avant-garde française", il fait du cinéma un art radicalement neuf, indépendant du théâtre et de la littérature. Pendant sa courte vie (il meurt à 56 ans), sa soeur sera une fidèle collaboratrice. Cependant, c'est à travers sa collaboration avec Jean Benoit-Lévy que la carrière de Marie Epstein va s'épanouir dans les années 1930. Elle écrit les scénarios, participe à la réalisation et assure le montage de nombreux films du cinéaste, entre 1927 et 1952. Leur compagnonnage débute en 1927 avec Âme d'enfants, suivi de Peau de Pêche en 1928 et de Maternité en 1929. Ces trois films témoignent d'un engagement social manifeste dans leur souci de décrire les conditions de vie des milieux modestes. Maternité est une réflexion moderne sur la condition maternelle, qui donne à la psychologie une place importante. Tournés dans des décors naturels, ces oeuvres aux intrigues mélodramatiques sont empreintes d'une vision humaniste de la société, exemplaires de la fonction éducative que Benoit-Lévy attribue au cinéma. Marie Epstein y imprime aussi sa marque, exprimant un point de vue féminin, un intérêt pour les questions liées à la maternité, à l'enfance et plus généralement à la condition sociale de la femme tout à fait avant-gardiste pour cette époque.
Durant les années 1930, Marie Epstein et Jean Benoit-Lévy réalisent 7 longs métrages. La Maternelle (1932), succès mondial, est sans doute le plus remarquable, par sa beauté visuelle et son étude sociologique d'un quartier populaire de Paris. À travers la vie d'une école maternelle, le film raconte l'histoire d'une petite fille, Marie, abandonnée par sa mère prostituée, qui trouve une mère de substitution avec Rose, une femme de service déclassée, interprétée par la grande comédienne Madeleine Renaud. Au-delà de son caractère moraliste, valorisant cette "bonne mère" et glorifiant l'école laïque, facteur de progrès social qui corrige la mauvaise éducation d'un prolétariat livré à la misère, La Maternelle porte un regard nouveau sur la sensibilité et la psychologie féminines. La subjectivité féminine y est exprimée à partir du point de vue de la petite fille. Autre nouveauté, Rose, figure de la mère idéale, est une femme non seulement douce et aimante (caractères traditionnellement "féminins"), mais aussi cultivée (elle possède un brevet d'enseignement supérieur).
En 1936, Jean et Marie Epstein sont parmi les membres fondateurs de la Cinémathèque française d'Henri Langlois et Georges Franju, sauveurs des films muets voués à la destruction par l'arrivée du cinéma parlant. En 1940, les Epstein sont radiés de la profession cinématographique par la Préfecture de police de Paris en raison de leur engagement politique, en particulier à la SFIO. Leur maison de Viroflay est pillée par les Allemands. Réfugiés en Zone libre, ils travaillent pour la Croix-Rouge française, qui, grâce aussi à l'intervention de l'actrice Orane Demazis, les sauvera de la déportation après leur arrestation par la Gestapo en 1944 en raison de leur origine juive. De retour à Paris en 1945, ils ont un temps le projet d'émigrer aux États-Unis.
Jean Epstein meurt en 1953. La même année, Henri Langlois embauche Marie à la Cinémathèque en lui confiant l'inventaire et la sauvegarde des films, ceux de son frère en particulier. La seconde vie de Marie Epstein commence, intimement liée à celle de la Cinémathèque. Elle en sera l'archiviste et la première restauratrice. Elle prend en charge le tirage et le remontage des films muets. La collection de l'institution s'enrichit au fil du temps, par vagues successives. Marie Epstein en dresse un inventaire rigoureux, vérifiant l'état des films, dont les plans sont rarement numérotés. Il faut remettre bout à bout les fragments, et parfois reconstituer le scénario, en essayant de respecter le premier montage, tâche dont elle s'acquitte avec une intuition remarquable. On lui doit entre autres la sauvegarde de La Roue (1921) et de Napoléon d'Abel Gance (1925). À la fin des années 1950, elle restaure les films sur support nitrate inflammable, désormais interdit, récupérés dans des laboratoires, essentiellement des films français des années 1930-1940. Marie Epstein sera plus tard chargée du tirage sur support acétate (safety) des films du 4e plan de sauvegarde et de restauration mis en place par l'État en 1968. Son outil de travail, la Moritone, table de montage fonctionnant avec un système d'image projetée, est célèbre à la Cinémathèque. Marie poursuivra son activité d'inventaire et de restauration sonore et visuelle jusqu'aux années 1980, assistée de la monteuse Renée Lichtig.

Ouvrages

  • 13e Festival international de films de femmes, Créteil, 13, 5-14 avril 1991. [Dominique Jules; collab. Yveline Lagarde]. - Créteil : Maison des Arts, 1991. Article consacré à Marie Epstein
  • Festival Il Cinema Ritrovato, Bologne, 25 juin-2 juillet 2016. "Marie Epstein, Cinéaste" Texte et programmation d'Emilie Cauquy
  • L' Or des mers / Jean Epstein; Postface de Jean-Pierre Gestin; Note biographique de Marie Epstein. - Quimperlé: La Digitale, 1995
  • To desire differently : feminism and the French cinema / Sandy Flitterman-Lewis. - New-York : Columbia University Press, 1996

Périodiques

  • Cahiers du Genre 2005/1, n° 38, septembre 2005 (ed. L'Harmattan). Geneviève Sellier, "Gender studies et études filmiques"
  • Cineforum, Volume XXXIII, n° 325, juin 1993. Giuseppe De Santi, "Marie Epstein, l'amputazione del corpo"
  • Immagine : note di storia del cinema, n° 1, 2003. Eric Le Roy, "Entretien avec Marie Epstein"
  • Segnocinema, Volume XXXII, n° 178, novembre-décembre 2012. Chiara Tognolotti, "Alla ribalta e dietro le quinte: Jean e Marie Epstein"

Liens Internet

Courts métrages

en tant que : Réalisateur

1930 Jimmy Jean Benoit-Levy, Marie Epstein

en tant que : Assistant réalisateur

1920Travail du potier (Le) Jean Benoit-Levy
1924Sériciculture (La) Jean Benoit-Levy
1925Bizerte Jean Benoit-Levy
1925Destruction des campagnols (La) Jean Benoit-Levy
1925Récolte de la pomme de terre (La) Albert Mourlan
1926Olivier (L') Jean Benoit-Levy
1927Ecole de Cibeins Jean Benoit-Levy
1929Nefta, la perle du Djerid Jean Benoit-Levy
1930Arbres fruitiers de plein vent Jean Benoit-Levy
1930Des métiers pour les jeunes filles Jean Benoit-Levy
1930Essai d'une locomotive au banc d'essai de Vitry Jean Benoit-Levy
1930Filature du coton (La) Jean Benoit-Levy
1930Fumier de ferme (Le) Jean Benoit-Levy
1939Renaître Jean Benoit-Levy
1951 Mort de Mimi Pinson (La) Jean Benoit-Levy
1951 Rêve d'amour Jean Benoit-Levy
1952 Agence matrimoniale Jean Benoit-Levy
1952 Deux maîtres pour un valet Jean Benoit-Levy
1952 French Cancan Jean Benoit-Levy

en tant que : Scénariste

1938 Vive la vie Jean Epstein, Jean Benoit-Levy

en tant que : Interprète

1962 Cinémathèque française (La) Jean Herman

Longs métrages

en tant que : Réalisateur

1927 Âme d'enfants Jean Benoit-Levy, Marie Epstein
1928 Peau de Pêche Jean Benoit-Levy, Marie Epstein
1931 Coeur de Paris (Le) Jean Benoit-Levy, Marie Epstein
1932 Maternelle (La) Jean Benoit-Levy, Marie Epstein
1934 Itto Jean Benoit-Levy, Marie Epstein
1936Hélène Jean Benoit-Levy, Marie Epstein
1937 Mort du cygne (La) Jean Benoit-Levy, Marie Epstein
1938 Altitude 3200 Jean Benoit-Levy, Marie Epstein

en tant que : Assistant réalisateur

1923 Coeur fidèle Jean Epstein
1929 Maternité Jean Benoit-Levy
1939 Feu de paille Jean Benoit-Levy

en tant que : Scénariste

1923 Coeur fidèle Jean Epstein
1924 Affiche (L') Jean Epstein
1926 Six et demi, onze Jean Epstein
1927 Âme d'enfants Jean Benoit-Levy, Marie Epstein
1929 Maternité Jean Benoit-Levy
1931 Coeur de Paris (Le) Jean Benoit-Levy, Marie Epstein
1932 Maternelle (La) Jean Benoit-Levy, Marie Epstein
1936Hélène Jean Benoit-Levy, Marie Epstein
1937 Mort du cygne (La) Jean Benoit-Levy, Marie Epstein
1957 Liberté surveillée Henri Aisner, Vladimir Voltchek

en tant que : Adaptateur

1927 Âme d'enfants Jean Benoit-Levy, Marie Epstein

en tant que : Dialoguiste

1937 Mort du cygne (La) Jean Benoit-Levy, Marie Epstein

en tant que : Interprète

1923 Coeur fidèle Jean Epstein
1995 Citizen Langlois Edgardo Cozarinsky