Formation
Fils de journalistes, Mathieu Amalric découvre l'univers du cinéma à l'occasion d'une visite sur les plateaux de tournage du réalisateur géorgien Otar Iosseliani, alors que son père est correspondant de presse à Moscou. C'est une révélation pour le jeune homme à qui le cinéaste offrira son premier rôle dans Les Favoris de la lune en 1984. Mais Mathieu Amalric ne se destine pas au métier d'acteur. Il reste néanmoins fasciné par le cinéma et s'investit dans la réalisation de courts métrages. Après une année d'hypokhâgne et un échec au concours de l'Idhec (Institut des hautes études cinématographiques), il exerce plusieurs métiers techniques sur des tournages : tour à tour accessoiriste, perchman, régisseur, assistant- réalisateur, assistant monteur, il accède au cinéma par les coulisses
Carrière au cinéma
Au sein de sa génération, Mathieu Amalric incarne par excellence l'acteur du cinéma d'auteur français. Pourtant, il se considère avant tout comme un réalisateur. Il tourne ses premiers courts métrages de manière quasi-artisanale dans les années 1980. Mais une rencontre déterminante va décider de sa carrière d'acteur : en 1990, alors qu'il monte son court métrage Sans rires, de nuit, à l'Idhec, il croise Arnaud Desplechin, jeune diplômé, lui-même sur le montage de La Vie des morts. Les deux hommes se retrouvent en 1991 au Festival Premiers Plans d'Angers où leurs films ont été sélectionnés. Après des essais infructueux pour le rôle principal de La Sentinelle (1991), premier long métrage de Desplechin, où il fera tout de même une apparition, Mathieu Amalric est recontacté pour jouer Paul Dedalus dans Comment je me suis disputé... (Ma vie sexuelle) (1994). Avec ce rôle, Amalric devient l'un des comédiens clés de l'univers d'Arnaud Desplechin, une sorte d'alter ego, interprétant un personnage tourmenté d'intellectuel perdu dans des questionnements existentiels et entretenant des relations compliquées avec les femmes. Vingt ans après, en 2014, Arnaud Desplechin reprendra avec lui le personnage de Paul Dédalus, devenu un homme mûr, dans Trois souvenirs de ma jeunesse, sorte de film matriciel du premier, qui réexplore les thèmes et les personnages majeurs de sa filmographie. Mathieu Amalric a déclaré qu'Arnaud Desplechin l'avait " inventé en tant qu'acteur ". Devenu un membre fondamental de la "troupe" du cinéaste, il interprète deux autres personnages forts de la comédie humaine de Desplechin : Ismaêl dans Rois et reine en 2003 et Henri dans Un conte de Noël en 2007. Il incarne souvent des intellectuels fantasques, exubérants ou dépressifs, auxquels il injecte sa folie douce et son art du décalage. Il excelle à interpréter des personnages à l'intériorité douloureuse, tout en étant capable d'effectuer des dérapages burlesques. Mathieu Amalric retrouve Arnaud Desplechin en 2012 avec Jimmy P., dans lequel il incarne l'anthropologue et ethnopsychiatre Georges Devereux aux côtés de Benicio Del Toro. En 1995, les critiques saluent sa performance, à la fois lunaire et comique, dans Le Journal du séducteur de Danièle Dubroux, d'après le roman du philosophe danois Soren Kierkegaard. Mathieu Amalric confirme sa place importante dans le cinéma d'auteur avec deux rôles marquants en 1998, dans Fin août, début septembre d'Olivier Assayas et Trois ponts sur la rivière de Jean-Claude Biette, tous deux au côté de Jeanne Balibar.
Avec Arnaud Desplechin, les cinéastes Arnaud et Jean-Marie Larrieu sont les autres grands partenaires de sa carrière d'acteur. Amalric tient le rôle principal dans La Brèche de Roland en 1999, Un homme, un vrai en 2002, Les Derniers jours du monde en 2008, et L'Amour est un crime parfait en 2013. En 2006, sa prestation dans le rôle du journaliste Jean-Dominique Bauby, atteint du locked-in syndrome, pour le film de Julian Schnabel Le Scaphandre et le Papillon est saluée à l'unanimité. La même année, il tourne pour Roman Polanski dans La Vénus à la fourrure, endossant l'un des deux rôles principaux au pied levé suite au désistement de l'acteur pressenti. Il fait quelques incursions dans le cinéma américain, en incarnant notamment pour la série des James Bond un inquiétant personnage dans Quantum of Solace (2008) de Marc Forster. Il fait la voix française de Mr Fox (doublant George Clooney) dans Fantastic Mr. Fox (2007) de Wes Anderson, réalisateur avec lequel il tournera aussi The Grand Budapest Hotel (2013).
Cependant, la véritable vocation de Mathieu Amalric est la mise en scène, étant selon lui devenu acteur "par accident". Il réalise plusieurs courts métrages à la fin des années 1980. Sa première oeuvre notable est en 1990 Sans rires, grand prix du jury au Festival Tous courts d'Aix en Provence. Il réalise en 1997 Mange ta soupe, son premier long métrage, en grande partie autobiographique, où il transforme en comédie une tragédie familiale. Puis, en 2000, il tourne l'adaptation d'un roman de l'écrivain italien Daniele Del Giudice, Le Stade de Wimbledon, histoire d'une quête personnelle et littéraire dans la ville de Trieste, avec pour interprète principale Jeanne Balibar. Son cinquième long métrage, Tournée (2009) rencontre un large succès public et critique. Ce road movie suit le périple d'une troupe américaine de cabaret "New burlesque" à travers la France. Mathieu Amalric y joue le personnage central, celui du manager français, charmeur et névrosé. Il n'avait jusque-là jamais joué dans ses propres films, à l'exception d'un court métrage. Le film remporte le Prix de la mise en scène au Festival de Cannes en 2010. Cette récompense accrédite sa stature de réalisateur auprès des producteurs. Après le tourbillon baroque de Tournée, Mathieu Amalric réalise en 2013 La Chambre bleue, adapté d'un roman de Georges Simenon, où il joue également le rôle principal aux côtés de Stéphanie Cléau. Ce film noir, à la construction très élaborée, retrace l'histoire d'une passion amoureuse et charnelle qui tourne à l'obsession dévorante. Le récit, juxtaposant flash-back et temps présent, induit une perte des repères temporels, crée le suspense et suggère l'enfermement. Bien que la sortie du film ait été plus confidentielle que le précédent, il a été bien accueilli par la presse, qui a apprécié la maîtrise de cet exercice de style et la capacité de renouvellement de son auteur.
Autres activités
Mathieu Amalric a réalisé plusieurs films pour la télévision. Pour Arte, dans le cadre de la collection " Masculin/Féminin ", il tourne en 2002 La Chose publique, une comédie dramatique avec pour toile de fond l'élection présidentielle française de 2002. L'Illusion comique, diffusé en 2010 sur France 2, est une adaptation contemporaine et d'une grande originalité formelle de la pièce de Corneille, avec les acteurs de la Comédie-Française. À son actif également, un portrait du dessinateur et réalisateur Joann Sfar pour Arte en 2010. Il tourne aussi des courts métrages de prévention ou de sensibilisation, comme La Magie de Noël (2014) pour la Sécurité routière, diffusé au cinéma, à la télévision et sur Internet.
Plus rare au théâtre, Mathieu Amalric a joué en 2005 dans Les variations Darwin (mise en scène de Jean-François Peyret) et Mefausti (mise en scène de Damien Odoul). Stéphanie Cléau l'a mis en scène dans une adaptation théâtrale du roman d'Eric Reinhardt, Le Moral des ménages, en 2014.
Prix
- Prix de la mise en scène, 2010 au Festival International du Film (Cannes) pour le film : Tournée
- Etoile d'Or du Premier Rôle Masculin, 2008 au Etoiles d'Or (Paris) pour le film : Le Scaphandre et le papillon
- Meilleure interprétation masculine, 2008 au Césars du Cinéma Français pour le film : Le Scaphandre et le papillon
- Meilleure interprétation masculine, 2008 au Les Lumières pour le film : Le Scaphandre et le papillon
- Meilleure interprétation masculine, 2007 au Copenhagen International Film Festival pour le film : La Question humaine
- Meilleure interprétation masculine, 2007 au Festival Internacional de Cine (Gijón) pour le film : La Question humaine
- Meilleure interprétation masculine, 2007 au Copenhagen International Film Festival pour le film : La Question humaine
- Meilleure interprétation masculine, 2005 au Les Lumières pour le film : Rois et Reine
- Etoile d'Or du Premier Rôle Masculin, 2005 au Etoiles d'Or (Paris) pour le film : Rois et Reine
- Meilleure interprétation masculine, 2005 au Césars du Cinéma Français pour le film : Rois et reine
- Meilleur espoir masculin, 1997 au Césars du Cinéma Français pour le film : Comment je me suis disputé... (ma vie sexuelle)