Formation
Manuel Poirier quitte rapidement le lycée. Tour à tour ouvrier, ébéniste, visiteur de prison, il travaille ensuite dans le secteur social auprès de personnes en difficulté. A l'âge de trente ans, il empoigne une caméra et réalise trois courts-métrages : La Première journée de Nicolas, La Lettre à Dédé et Appartement 62.
Carrière au cinéma
En 1991, l'autodidacte Manuel Poirier réalise son premier long métrage, La Petite amie d'Antonio. Ce portrait d'un jeune couple franco-espagnol un peu paumé remporte un succès d'estime et incite le producteur Maurice Bernard à proposer à Poirier une convention d'écriture pour son prochain film. Ce sera ... A la campagne (1994) qui décline les thèmes chers au réalisateur : l'amitié, l'amour, la campagne autour de la rencontre entre une jeune femme sortie de prison (Judith Henry) et un homme retiré en province (Benoît Régent).
La caméra de Manuel Poirier s'intéresse à la vie de province, loin du microcosme de la capitale, et en capte, avec une douce nonchalance mi-tragique mi -comique, les spécificités. En 1996, Marion est une fable moderne et humaniste sur la lutte des classes où deux couples, ses modestes parents et de riches parisiens en résidence secondaire, se disputent l'affection d'une petite fille. La même année sort Western : tourné en Bretagne, ce road movie réunit deux personnages gentiment marginaux et largués, Paco et Nino (incarnés par Sergi Lopez et Sacha Bourdo), en vadrouille à travers le Finistère en quête d'amitié et d'amour. Ce film empathique et chaleureux reçoit un très bon accueil dans les salles et une consécration à Cannes où il remporte le Prix spécial du jury.
A la suite de ce succès inattendu, Manuel Poirier fait une pause, ne revenant que trois ans plus tard avec un documentaire où l'on retrouve son intérêt pour les déclassés, les exclus, puisqu'il donne la parole à des enfants placés en foyer ou en famille d'accueil : De la lumière quand même (2000). Avec Te quiero (2001), adaptation très libre d'un roman de Patrick Modiano (Dimanches d'août) transposé au Pérou, Poirier explore d'autres horizons tout en restant fidèle à ses personnages en marge, ici un jeune couple encombré d'un diamant volé.
Les Femmes... ou les enfants d'abord... (2002) le ramène vers des territoires plus familiers, ceux du Morbihan, à la suite de Tom (l'indispensable compère Sergi Lopez), époux et père de famille dont la vie est bouleversée par la survenue de son ex et d'une fille dont il ignorait l'existence. Entre réalisme social et tendresse humaine, gravité et légèreté, le cinéma de Poirier est ici à son meilleur. Chemins de traverse (2004) est tout aussi personnel en racontant l'errance d'un père (Sergi Lopez) et de son fils adolescent, leur apprivoisement mutuel, leurs émotions amoureuses... La Maison (2007) est tout aussi attentif à ses personnages de peu, ici un homme en instance de divorce (Sergi Lopez) qui s'éprend d'une maison dans la campagne et de toute l'histoire qu'elle véhicule. Adapté du récit autobiographique du chanteur Pierre Perret, Le Café du pont (2010), plonge dans les mêmes parages provinciaux et familiaux dans la France des années 1940.
Autres activités
Manuel Poirier a fait ses premières armes à la télévision, en signant pour Canal+ une série de sketches comiques à l'humour très noir interprétés par Albert Dupontel et Michel Vuillermoz, Sales histoires (1990). Il réalise également Attention, fragile (1994), un des volets de la collection d'Arte Les Années lycée, en lui donnant pour cadre les manifestations étudiantes de 1986 contre la loi Devaquet. Le Sang des fraises (2006) est un récit initiatique sur un adolescent en Dordogne.