Formation
Jean Cocteau a grandi avec, et en même temps que le cinéma (terme auquel il préféra toujours celui de cinématographe). Son enfance et son adolescence furent marquées par la découverte des films de Méliès. Plus tard, ce sont les maîtres du burlesque américain (Keaton, Chaplin) qui exercèrent sur lui une influence déterminante. Bien qu'il n'ait jamais reçu la moindre formation technique, dès la fin des années 10, il laisse transparaitre dans son oeuvre littéraire une écriture de type cinématographique.
Carrière au cinéma
"Ma prochaine oeuvre sera un film", note Cocteau à la fin d'Opium, journal d'une désintoxication. De fait, en 1930, à 40 ans révolus, Cocteau passe à l'acte cinématographique avec Le Sang d'un poète, expérience de cinéma en liberté qu'il rêvera toute sa vie de renouveler. L'œuvre est une commande du Vicomte de Noailles (à l'origine un dessin animé) qui lui laisse totale liberté quant au choix du sujet et à la forme d'expression. Expérience a priori sans lendemain, puisque Cocteau mettra dix ans avant de revenir au cinéma, par le biais de l'écriture d'abord (scénariste, adaptateur, dialoguiste) pour des réalisateurs aussi divers que Marcel L'Herbier (La Comédie du bonheur, 1940), Serge de Poligny (Le Baron fantôme, 1942), Jean Delannoy (L'Eternel retour, 1943), Robert Bresson (Les Dames du bois de Boulogne, 1944). C'est au prix de mille difficultés économiques et techniques qu'il parvient à réaliser lui-même, en 1945, La Belle et la Bête, "conte de fées sans fée" dont le succès populaire et critique (Prix Louis Delluc 1946) le consacre comme un réalisateur crédible.
Supportant mal les contraintes économiques, Cocteau ruse avec le cinéma commercial, n'acceptant d'endosser le rôle du réalisateur que pour les projets qui lui tiennent le plus à coeur (adaptations de ses propres pièces de théâtre L'Aigle à deux têtes en 1947, Les Parents terribles en 1948), abandonnant ce rôle à d'autres lorsqu'il le peut (Pierre Billon pour Ruy Blas, 1947), quitte à jouer en coulisse le rôle qu'il n'accepte pas d'assumer officiellement (Les Enfants terribles, Jean-Pierre Melville, 1949). L'échec commercial d'Orphée (1950), film dans lequel il s'investit totalement, l'affecte profondément et le détourne définitivement du cinéma commercial. Il tente de retrouver la voie d'un cinéma plus libre en exploitant le format 16 mm (Coriolan, 1947 ; Villa Santo Sospir, 1951) ou en prêtant son concours (notamment par le biais de l'adaptation ou du commentaire) à de jeunes réalisateurs, avant de revenir au 35 pour un ultime essai, Le Testament d'Orphée (1959), réalisé grâce au soutien de François Truffaut.
Cinéaste cinéphile, et cinéphile militant, à partir de la fin des années 40, Cocteau oeuvre par son nom, sa voix ou sa plume pour promouvoir une nouvelle "avant-garde" cinématographique. Il soutient l'organisation du Festival du film maudit de Biarritz en 1949, dont il accepte la présidence, et y rencontre une nouvelle génération de cinéphiles qui deviendront, à peine dix ans plus tard, les cinéastes de la Nouvelle Vague. Figure centrale du Festival de Cannes dans les années 50, il est à deux reprises président du jury des longs métrages (1953, 1954) et devient le Président d'honneur du Festival à partir de 1957. Il exercera une influence durable sur nombre de jeunes cinéastes parmi lesquels Jacques Demy, François Truffaut ou Jean-Luc Godard.
Autres activités
D'abord connu comme poète, dramaturge et romancier (Le Cap de Bonne-Espérance, Le Potomak, La Machine infernale, ...), Cocteau exerça une influence considérable sur la vie artistique de son époque, touchant aussi bien au domaine des arts plastiques (nombreux dessins et peinture) qu'à ceux du ballet (Les Biches, Le Jeune homme et la Mort) ou de la musique (nombreuses collaborations avec les compositeurs du Groupe des Six, notamment Auric et Poulenc, mais aussi Stravinsky). Il exerça également une intense activité de critique. Il fut élu à l'Académie française en 1955.